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lundi 9 septembre 2013

Les femmes s'en balancent-elles vraiment ?










“I feel women in general are less comfortable than men in inhabiting a highly austere, cold, analytical space, such as the one which philosophy involves. Women as a whole - and there are obvious exceptions - are more drawn to practical, personal matters. It is not that they inherently lack a talent or aptitude for philosophy or higher mathematics, but rather that they are more unwilling than men to devote their lives to a frigid space from which the natural and the human have been eliminated.” 




     Dans ce livre (1939) Susan Stebbing, qui ne s'en balançait pas, analyse des fallacies, parmi lesquelles celle-ci :


The fallacy of the undistributed middle: the traits of some members of a group are attributed to all membersof that group. It is sometimes the case that an attack upon some members can be easily twisted into an attak on all members of that group

addendum 10 sept 13 

   Dans un article de Lorraine Code , paru ici , je trouve cette déclaration (à mes yeux) extraordinaire:




   Donc si je comprends bien , s'interroger sur les raisons, et la raison, est un exercice typiquement mâle.
   Je serais vraiment curieux de savoir ce qu'en pensent les auteurs comme les suivants : 


Maria Alvarez (2010) Kinds of Reasons: An Essay in the Philosophy of Action Oxford University Press 

Pamela Hieronymi ,


par exemple. Est-ce que ces philosophes "s'alignent avec des manières masculines de penser" ? 



5 commentaires:

  1. On lit toujours vos billets, Ange Scalpel, avec un vif intérêt.
    Peut-on trouver la traduction en français, à défaut de l' original en anglais, du livre de Susan Stebbing?

    Une autre question au spécialiste pointu que vous êtes, comment traduisez-vous l' expression " potted thinking"?

    J' ai lu son explication :

    " We easily fall into the habit of accepting compressed statements which save us from the trouble of thinking. Thus arises what I shall call Potted Thinking:

    "This metaphor seems to me to be appropriate, because potted thinking is easily accepted, is concentrated in form, and has lost the vitamins essential to mental nourishment. You will notice that I have continued the metaphor by using the word ‘vitamins.’ Do not accept the metaphor too hastily: it must be expanded. Potted meat is sometimes a convenient form of food; it may be tasty, it contains some nourishment. But its nutritive value is not equivalent to that of the fresh meat from which it was potted. Also, it must have originally been made from fresh meat, and must not be allowed to grow stale. Similarly a potted belief is convenient; it can be stated briefly, sometimes also in a snappy manner likely to attract attention. A potted belief should be the outcome of a belief that is not potted. It should not be held on to when circumstances have changed and new factors have come to light. We should not allow our habits of thought to close our minds, nor rely upon catch-words to save ourselves from the labour of thinking. Vitamins are essential for the natural growth of our bodies; the critical questioning at times of our potted beliefs is necessary for the development of our capacity to think to some purpose."

    Puis-oser une métaphore culinaire ( pas très philosophique cela, j'en conviens et m'en excuse par avance) qui irait dans le sens d'une revendication type sufragette, penser aux petits oignons, par exemple?
    Bien à vous.

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  2. Susan, dite Lizzie, Stebbing (1885-1943) est une grande philosophe britannique. Issue de Cambridge, où elle rédigea sa thèse contre Bergson et fut élève de G.E. Moore, elle enseigna la logique et la philosophie analytique à Bedford College de 1920 . Elle fonda le principal journal de philosophie analytique , Analysis.
    Une chaire porte toujours son nom à l'université de Londres.

    Thinking to some Purpose n'existe malheureusement qu'en anglais, de même que sa Logic (1930). Thinking to some purpose a été réédité en 1948, et plus tard chez Pelican, mais je ne sais s'il est encore disponible.

    Elle fut à contre courant car elle était i) logicienne (ii) métaphysicienne, alors même que le milieu auquel elle s'adressait était (i) mais pas (ii) ou inversement.

    Les féministes ne se sont guère intéressée à elle car elle défendait une conception rationaliste pure et dure, peu aux "petits oignons" pour elles.


    "Potted thinking" , votre traduction "penser aux petits oignons" est très bonne. C'est penser pour son "pot", penser pour sa paroisse et avec le souci de conforter ses propres opinions, sans s'exposer à la critique des autres, quitte à se cuisiner ses convictions.

    Un livre est paru sur elle cette année

    http://www.palgraveconnect.com/pc/doifinder/10.1057/9781137313102


    Lizzie Stebbing ne s'en balançait pas.

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  3. Bonjour,

    (N’ayant pas de compte google… et ne comprenant pas vraiment les autres options pour poster les commentaires j’ai pris l’option par défaut « anonym » mais je n’ai cure de l’anonymat aussi je signe de mon nom : Serge Cospérec)

    J’ai découvert Susan Stebbing grâce à Pascal Engel. Merci à lui. Pour ce qui est du « potted thinking », je n’ai pas le sentiment que l’interprétation donnée ici soit exacte. Les exemples donnés par Stebbing ne suggère nullement ce type de défaut (« penser pour sa paroisse et avec le souci de conforter ses propres opinions » ou pour son pot). Stebbing use d’une métaphore : le phore est ici la « viande en boîte », ce produit typiquement anglo-saxon (hormis certains pâtés). La métaphore insiste sur l’opération de « réduction » (on a séparé la viande mécaniquement avant de la réduire en miette et de la cuire pour obtenir un genre de viande en pâte assez immonde) et de concentration (comme dans l’expression « lait concentré », et donc si on veut ici une pensée « en concentré »). Des rillettes de canard sont une sorte de canard en pot, mais très transformé.

    Stebbing explique que souvent nous nous contentons de ces pensées « en boîte » (ou en concentré) par fainéantise ou ignorance. Elle donne plusieurs exemples : « A une époque il était fréquent de résumer les travaux psychanalytiques de Freud par la formule ‘‘Tout est sexe’’ ». Elle ajoute « dire que l’amour, l’art, la politique et la religion ne sont que du sexe semblerait simplement absurde à la plupart des gens ». C’est un exemple de «potted thinking » dit-elle ; les travaux de Freud étant difficiles à lire (langage technique, travaux expérimentaux ou analyses compliquées et souvent inaccessibles)… alors on les résume par un « tout est sexe ». Et Stebbing souligne que les sectateurs de Freud n’admettraient probablement pas cette réduction.

    Bref, le « potted thinking » c’est de la « pensée en boîte » de type slogan plutôt que de la pensée aux petits oignons qui suggère un accommodement, une pensée « à façon », etc. C’est de la pensée complexe réduite a du slogan qui (comme tout slogan) peut être vrai ou faux, mais dont on ne peut précisément rien dire tant qu’on n’a pas redéployé l’argumentation qui la sous-tend. Stebbing donne l’exemple du slogan politique « nourriture taxée, nourriture chère » ; cela peut-être vrai dit-elle mais on n’en sait rien car le coût de la vie ne dépend pas que des taxes. Le potted thinking est utilisé dans la rhétorique politique pour réduire l’adversaire. Stebbing donne des exemples : « les pacifistes poltrons», « les capitalistes arrogants », etc. Ces expressions sont des produits typiques de la « pensée en boîte ». L’épithète est lié au nom qu’il qualifie de façon à empêcher qu’on puisse se représenter un pacifiste autrement que comme un lâche et un capitaliste autrement que comme arrogant. Etc.

    L’usage de pensée en boîte est inévitable et utile jusqu’à un certain point dit encore Stebbing. Notamment dans la communication politique. Mais, c’est comme une morceau de viande en boîte, on ne peut pas le prendre pour une pièce de viande fraîche. Avec une différence majeure : on ne peut « dépoter » la viande en boîte de façon à retrouver une belle pièce de viande fraiche, on peut en revanche dépoter de temps en temps une « pensée en boîte » (potted thinking), analyser les principes sur lesquels se fondent la conclusion « en boîte ». Et elle met engarde contre les croyances funestes impliquées dans toutes les pensées en boîtes.
    Finalement même l’expression « France byzantine » peut fonctionner comme un genre de potted thinking. Par exemple, dire que Bergson, Sartre, BHL, Deleuze, etc… « c’est l’éternelle France byzantine ». Et une pensée en boîte (ou très concentrée) peut être vraie. Il suffit de lire Lois de l’Esprit, Julien Benda ou la raison, pour s’en convaincre.

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  4. Merci de cette lecture ( Stebbing est une grande philosophe, même si elle a peu écrit); mais ne pensez vous pas que les deux interprétations sont compatibles ? Quelqu'un qui pense "pottedly" ( si je puis dire) pense à la fois de manière "encapsulée", en "boîte" ou " toute faite" , comme vous l'expliquer excellemment, mais il pense aussi COMME IL AIMERAIT PENSER , c'est à dire en se mitonnant son corned beef . Le potted thinker peut être aussi, tel Benda, celui qui ses dadas, qui retrouve partout ce qu'il n'aime pas et qui cherche tout le temps l'occasion de réitérer ses "marottes" ( Sartre). Mais en effet on peut avoir sa marotte tout en disant vrai, car de fait il y a beaucoup de répétition, ce qui fait que les marottes trouvent toujours leur cible. Qui n'est frappé de l'immense similitude de la bêtise de notre début de vingtième siècle avec celle du début du précédent? Ce serait triste si ceux que nous attaquons pouvaient vraiment dire ( mais il ne font que de manière feinte): " vous ignorez la subtilité de ma pensée". Non on peut, la plupart du temps ignorer leur subtilité....

    Cela dit Benda, ou l'auteur que vous avez l'amabilité de citer, sont ils à ce point obsessionnels ou adeptes du stéréotype ? Telle ou telle page de Bergson est-elle vraiment un tel jaillissement de création et de finesse ? Seulement pour ceux qui pensent que "l'universel est ce qui est assez grossier pour l'être".

    Avec mon meilleur souvenir

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  5. Ce que vous dites me semble juste. Et c'est terrible car, en y pensant, je peux me demander si en vérité, comme les autres, je ne cherche pas non plus le plus souvent à réitérer mes "marottes". Il faudrait inclure cette réflexion dans un traité des vertus épistémique au titre des procédés réflexifs d'auto-contrôle (est-ce que là je ne mitonne pas un peu ?).
    Je suis d'accord on passe facilement de l'encapsulé au mitonné.
    Et lorsque j'ai mentionné l'expression "France Byzantine" comme illustration de potted thinking, c'est bien l'expression qui m'intéressait (un encapsulé qui permet de signifier rapidement sa critique). Quant à la critique à laquelle renvoie l'expression, elle me semble tout à fait juste.
    Pour être tout à fait honnête, c'est en lisant ce livre sur Benda que j'ai compris pourquoi je ne comprenais rien à l'enseignement de philosophie que j'ai reçu à la Sorbonne au début des années 80. On y valorisait, à de rares exceptions près, le byzantin. Or je suis plutôt de type rustique. Le seul avantage est qu'il suffit de connaître les codes rhétoriques pour donner à son tour l'illusion de la profondeur.
    Merci.

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